Alors que la crise sanitaire a révélé et amplifié les difficultés dont souffrent les habitants des QPV, 120 maires avaient écrit au Président de la République en novembre afin de s’assurer que 1% du Plan de relance serait consacré aux QPV. Le CIV du 29 janvier a permis d’une part de mesurer les avancées de la Mobilisation nationale pour les habitants des quartiers, initiée par le gouvernement en 2018, et d’autre part d’acter un certain nombre de mesures destinées à amplifier les efforts en faveur des QPV dans une perspective d’égalité des chances.
Les nombreuses mesures présentées ont vocation à renforcer les moyens dans l’ensemble des champs d’action publique, en lien avec les priorités inscrites dans les contrats de ville et tenant compte de l’évolution constatée des situations locales, en proposant notamment l’amplification de plusieurs programmes expérimentaux : Cités éducatives (46 nouveaux territoires concernés dont 8 en Hauts-de-France) et Cités de l’emploi - dont la généralisation est annoncée pour les prochains contrats de ville - et l'initiation de nouveaux programmes expérimentaux (Cités de la jeunesse par exemple).
Rapide passage en revue des principales mesures :
- Prévention de la délinquance et de sécurité : renforcement de la présence adulte dans les quartiers (300 médiateurs formés et 300 éducateurs de prévention spécialisée), lutte contre les trafics de stupéfiants, renforcement du traitement de la petite délinquance, prévention des risques de dérives radicales et séparatistes, renforcer les liens police-population ;
- Logement et cadre de vie : il s’agit de renforcer la mise en œuvre des mesures existantes favorisant la mixité sociale (signatures et applications des conventions intercommunales d’attributions, loi SRU…), d’amplifier les moyens dédiés au traitement des copropriétés dégradées, d’accélérer et amplifier le NPNRU, la réhabilitation des logements sociaux, des équipements publics et d’initier un plan de rattrapage des équipements sportifs, renforcer la place de la nature en ville en particulier avec Quartiers fertiles, le soutien à de nouveaux jardins partagés et la mise en place d’opérations exemplaires forestières ou agricoles (Territoires engagés sur la nature) ;
- Education et petite enfance : amplification des Cités éducatives (46 nouveaux territoires concernés dont 8 en Hauts-de-France : Beauvais, Montataire, Soissons, Dunkerque - Grande-Synthe, Douai – Waziers, Hautmont - Louvroil - Maubeuge - Neuf-Mesnil, Avion, Liévin) et de l’offre de services mise à leur disposition par les différents ministères, financement renforcé des places de crèche, développement des cordées de la réussite et des internats d’excellence ;
- Emploi, insertion professionnelle et activité économique : amplification des différentes mesures amorcées en 2020 visant à renforcer l’accompagnement des jeunes et demandeurs d’emploi des QPV (formation, recrutement de conseillers Pôle emploi, mobilisation des missions locales pour la garantie jeunes, amplification des moyens du Programme d’Investissement dans les Compétences notamment en matière de lutte contre l’illectronisme….), déploiement de l’expérimentation « Territoires zéro chômeur de longue durée » et renforcement des clauses d’insertion, déploiement de 60 nouvelles Cités de l’emploi ;
- On relèvera le retour du développement économique avec le lancement de « Quartiers productifs » visant à accompagner les collectivités locales dans la définition et la mise en oeuvre de stratégies de développement économique dans les QPV. Programme porté par le ministère de la ville, en partenariat avec la Caisse des dépôts, l’ANRU, l’ANCT et BPI France, Quartiers productifs permet d’actionner 4 leviers en faveur du développement économique des quartiers : l’entreprenariat, le commerce/l’artisanat, l’implantation d’activités industrielles et de services, et la transition numérique ;
- Cohésion sociale : les opérations Quartiers d’été et Vacances apprenantes initiées en urgence pour l’été 2020 seront reconduites, de même que le fonds Quartiers solidaires qui permet de soutenir les associations qui font vivre la solidarité au quotidien dans les quartiers prioritaires. La lutte contre les discriminations est réaffirmée comme un enjeu avec le souhait de relancer les plans territoriaux, qui pourront, en matière d’accompagnement des victimes, s’appuyer sur le lancement d’une plate-forme de signalement de discriminations et des partenariats avec les délégués du Défenseur des Droits.
- Santé : ouverture de 60 centres et maisons de santé pluri-professionnels et participatifs dans les quartiers afin d’offrir une prise en charge globale (médico-psycho-sociale) adaptée aux besoins particuliers des habitants des QPV, en recourant à des services de médiation sanitaire et d’interprétariat, le renforcement et la modernisation des dispositifs de lutte contre les addictions et le déploiement de nouvelles maisons sport-santé .
- Culture : priorisation des QPV pour le déploiement des microfolies, plan d’investissement dans les bibliothèques et soutien aux libraires, partenariat renforcé et création de tiers-lieux culturels.
1% du Plan de relance
La nécessaire mobilisation du Plan de relance dans les quartiers de la politique de la ville est également actée (soit 1 Milliard d’€) autour de trois priorités :
- l’emploi et l’insertion professionnelle des jeunes ;
- l’amélioration du cadre de vie et l’attractivité des territoires ;
- le renforcement de la cohésion sociale.
Les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) en préparation pour l’été traduiront cette ambition et s’articuleront avec les contrats de ville qui ont été prolongés jusque décembre 2022. Les préfets sont chargés d’assurer le lien aux élus locaux sur la moyens mis à disposition des QPV (communication dédiée, soutien en ingénierie, associations d’élus aux comités régionaux et départementaux de suivi de la relance…)
La Politique de la ville : éléments de méthode
Enfin, le CIV a permis de repréciser des éléments de méthodes de la politique de la ville tels que la mobilisation du droit commun, la place des habitants dans la co-construction et la conduite de la politique publique, le partenariat et l’accompagnement du monde associatif, le dialogue Etat et collectivités, la nécessaire lisibilité des dispositifs… et invite l’ensemble des acteurs à engager les réflexions pour l’après 2022.
Pour retrouver l’ensemble des mesures du CIV, consulter le dossier de presse et l'article de synthèse sur le site de l'ANCT
Les associations d'élus proposent une "saison 2" du Pacte de Dijon
A noter, les associations d’élus, ADCF, France Urbaine et Villes de France, qui avaient initié le Pacte de Dijon (visant à renforcer la mobilisation des compétences de droit commun dans une logique de responsabilité partagée) ont adressé le 28 janvier 2021 – la veille du CIV - un appel commun visant à intégrer un volet cohésion urbaine et sociale aux Contrats de Relance et de transition Ecologique (CRTE). Selon les associations d’élus, ces contrats appelés à coordonner les engagements de l’Etat au profit du projet de territoire porté par la collectivité doivent permettre à très court terme, d’identifier les projets, de maitrise d’ouvrage communale, intercommunale ou d’acteurs associatifs, prêts à démarrer et qui répondent aux grandes lignes de la relance : rénovation énergétique des bâtiments publics, revitalisation artisanale et commerciale, déploiement de l’usage du vélo, emploi des jeunes… Mais à plus long terme, celui du mandat, l’objectif serait de positionner les enjeux de cohésion urbaine et sociale au cœur même de la contractualisation pluriannuelle et transversale avec l’Etat. Une contribution à la réflexion post-2022, les contrats de ville n’étant à ce stade pas remis en cause avant leur terme.
Retrouvez l’intégralité de la prise de position de l’AdCF, France urbaine et Villes de France
En conclusion, on ne peut que souligner l’ampleur des moyens mobilisés en faveur des quartiers Politique de la ville par ce Comité Interministériel des Villes. Se présentent néanmoins de grands défis pour assurer localement le déploiement et la mise en cohérence de ces mesures (dont une bonne partie relève d’expérimentations sur un nombre de territoires restreints) avec les contrats de ville actuels qui couvrent les 1514 Quartiers prioritaires de la politique de la ville. Gageons néanmoins que la mobilisation collective permettra de tirer des enseignements de ces expérimentations qui permettront d’alimenter les réflexions sur les futurs contrats de ville post-2022 qui ont également été évoqués par ce CIV.