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Relancer l'éducation populaire : le CESE émet ses préconisations

Pour la première fois de son histoire, le CESE s'est saisi de la question de l'éducation populaire. Le 28 mai 2019, Christian Chevalier, professeur des écoles et ancien secrétaire général du syndicat des enseignants (Unsa) et Jean-Karl Deschamps, co-secrétaire général de la Ligue de l’enseignement ont publié un avis adopté par le Conseil Economique Social et Environnemental (CESE). Cet avis interpelle l'Etat et les collectivités territoriales, les invitant à réinvestir le champ de l’éducation populaire.

L'éducation populaire est un mouvement qui trouve ses origines à la Révolution Française et qui s'est fortement développé au cours du XIXème siècle avec la création de la ligue de l'enseignement ou encore la légalisation des syndicats. Comme nous le rappelle la saisine du 11 septembre 2018 du CESE, ce mouvement est issu de plusieurs courants de pensée, tels que les réflexions pédagogiques, le mouvement laïque, la formation ouvrière, ou encore la doctrine sociale de l'église catholique. 

Condorcet, en 1792, indique dans son rapport "L'Organisation générale de l'instruction publique" (fondateur de l'éducation populaire en France) que l'éducation  « permet d'établir une égalité de fait et de rendre l'égalité politique reconnue par la loi » . Ainsi, l'éducation populaire a pour objectif l'émancipation collective comme individuelle du peuple, le développement de la citoyenneté, l'engagement et la cohésion sociale.

L'actualité des derniers mois en France montre à quel point l'éducation populaire a sa place dans la société en permettant aux citoyens et aux citoyennes de s'exprimer et, ainsi, faire vivre la démocratie. Dans ce contexte, l'éducation populaire pourrait constituer une réponse à la crise de confiance en la démocratie représentative. 

Synthèse du rapport du CESE 

 
Dans leur rapport intitulé "L'éducation populaire, une exigence du 21ème siècle", les auteurs démontrent toute la difficulté de définir et d'identifier ce qu'est l'éducation populaire de par son caractère prothéiforme. En effet, l'éducation populaire se décline de diverses manières (engagement, solidarité, citoyenneté, bénévolat, militantisme, éducation, monde associatif...) et elle est portée par une multitude de structures issues de domaines variés comme les loisirs, le sport, la culture, le champ éducatif et social, la santé, la lutte contre la pauvreté, l'environnement ou encore les droits humains.
 
Toutefois, les rapporteurs ont identifié des constantes dans ce foisonnement. En effet, tout ces projets ont pour moteur l'intérêt général avec des objectifs de transformation, d'innovation sociale et d'émancipation. Tous utilisent la pédagogie active avec l'idée que chaque individu est à la fois sachant et apprenant et dans une posture de bienveillance. Enfin l'éducation populaire revêt toujours une dimension locale. Dans cette perspective, les actions de l'éducation populaire précèdent et accompagnent les politiques publiques car elles apportent l'expertise des acteurs de terrain et leur forte capacité d'innovation. 

 

Pour autant les rapporteurs soulèvent la fragilité des structures de l'éducation populaire : 

 
  •  les structures font face à des baisses de financements, particulièrement les financements de l'Etat,
  • les collectivités locales sont les principales sources de financements des structures, mais leur engagement est inégal selon les territoires ce qui crée de fortes disparités, 
  • l'éducation populaire peine à renouveler son image et à effectuer sa mutation pour répondre aux nouveaux enjeux de société (numérique, peu de mixité dans les gouvernances...) 

 

Pour répondre à ces différentes problématiques, les rapporteurs proposent 20 recommandations s'articulant autour de 5 grands axes :

1) Investir dans les politiques publiques d’éducation populaire pour contribuer à réconcilier la société

Le CESE préconise l'engagement d'un plan national volontariste dont l'objectif sera de faire vivre sur tous les territoires, en priorité les plus fragilesau moins un équipement pluridisciplinaire, lieu de rencontres, de partage et de débat. Pour ce faire, l'État doit intègrer cet objectif aux futures contractualisations pluriannuelles qu'il négocie avec les collectivités locales, mobiliser des fonds européens, et renforcer la capacité de co-financement des pouvoirs et des institutions publics pour en garantir l'aménagement et le fonctionnement. Pour le portage politique, le CESE propose que soit nommé, de façon pérenne auprès du Premier ministre, une ou un délégué interministériel à l’éducation populaire.

Le CESE préconise également un renforcement significatif des moyens humains et financiers de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) pour mieux exercer les missions suivantes : observation, accompagnement de la recherche, évaluation, recensement, préservation et promotion des méthodes et démarches d'éducation populaire. Le CESE propose également un soutien accru à la recherche dans les domaines de l'éducation populaire.

2) Développer le lien social pour conforter la citoyenneté

Le CESE préconise un plan de relance des projets éducatif de territoire(PEDT) en en faisant un outil permettant la synergie de l'action des co-éducateurs sur leur territoire. Le CESE préconise également de renforcer le Parcours citoyen au collège et au lycée en favorisant le travail partenarial entre les actrices et acteurs de l'Éducation nationale et ceux de l'éducation populaire. 

Il propose de relancer les colonies de vacances et les classes de découverte, pour ce faire, il s'agit de sécuriser leur cadre et administratif et le retour à un niveau de financement public permettant le départ de chaque enfant au moins trois fois durant sa scolarité. Il recommande aussi la pérennisation des Fabriques d'initiatives citoyennes. 

Enfin, pour permettre à nombre de salariés et à leurs familles, de bénéficier d'activités socio-éducatives, culturelles ou sportives, le CESE préconise l'intégration dans les conventions collectives, d'une mesure permettant d'accompagner les salariées et salariés des entreprises sans Comité d'entreprise.

3) Sécuriser le modèle économique

Le CESE préconise de favoriser le recours à la convention pluriannuelle d’objectifs (CPO) comme mode de financement de l'activité des organisations d'éducation populaire et d'augmenter le nombres de poste Fonjep. 

Le CESE recommande également le maintien du cadre fiscal spécifique aux organisations d'éducation populaire. En ce qui concerne les Comités sociaux et économiques d'entreprise, le CESE la sécurisation du cadre actuel d'intervention.

4) Former les différents acteurs et reconnaître leurs compétences 

Le CESE préconise d'identifier et de coordonner l'offre de formation initiale et continue aux métiers relevant de l'éducation populaire et d'ouvrir le Compte engagement citoyen (CEC) à tous les bénévoles qui s'investissent au moins 200 heures par an dans des actions associatives et d'envisager l'abondement du CEC par le compte personnel de formation. La formation des bénévoles doit faire l'objet d'un fort investissement, pour ce faire, il s'agit d'abonder significativement le Fonds de Développement de la Vie Associative (FDVA).

5) Favoriser l’engagement et renouveler la gouvernance

Le CESE préconise de développer le Passeport Bénévole®,de le promouvoir dès le lycée et de renforcer les moyens d'accès aux services civiques dans les organisations d'éducation populaire. 
 
Par ailleurs, le CESE préconise de populariser les articles 10 et 43 de la loi "Égalité et citoyenneté" de janvier 2017 et de faire une évaluation régulière de son application. Cette loi permet à tous bénévoles de bénéficier d'un congé pour siéger dans l'organe d'administration ou de direction d'une association. Elle permet aussi à des jeunes de 16 ans d'en assumer l'administration.
 
Concernant la gouvernance, le CESE préconise d'expérimenter l'extension, au-delà de six ans, du crédit d'impôt permettant de couvrir les charges liées à la garde d'enfants afin de promouvoir la parités dans les instances statutaires des organisations. 
 
Enfin, le CESE recommande d'inciter les structures de l'éducation populaire à limiter pour leur dirigeantes et dirigeants à trois le nombre de mandats consécutifs ou à neuf ans, à favoriser l'accès des jeunes et à garantir la parité dans leurs instances statutaires.
 
Publié le 12 juin 2019