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Education prioritaire : le Cnesco pointe une aggravation des inégalités sociales

Le Conseil national d'évaluation du système scolaire (Cnesco) a publié le 27 septembre un rapport dressant un bilan des inégalités sociales et migratoires à l'école. Il pointe notamment une aggravation de ces inégalités.

Le Cnesco a mobilisé pour produire ce rapport 22 équipes de chercheurs français et étrangers pendant deux ans afin de "mesurer et de comprendre, dans son exhaustivité, l’ampleur et les formes réelles des inégalités sociales et migratoires à l’école et comment l’école française en 2016 fabrique de l’injustice scolaire".

Ce rapport montre que la fabrication des inégalités à l'école se fait à plusieurs niveaux, à chaque étapes de la scolarité :

  • dans la famille : inégalités sociales
  • à l'école : inégalités de traitement, inégalités de résultats, inégalités d'orientation, inégalités de diplômation
  • dans l'emploi : inégalités d'insertion professionnelle.

 

L'école hérite donc d'inégalités familiales, mais elle amplifie aussi les inégalités de la société : elle produit "en son sein, à chaque étape de la scolarité, des inégalités sociales de natures différentes qui se cumulent et se renforcent". La dégradation du contexte économique et social ainsi que les interventions des parents ne seraient que peu responsables. Le rapport met en cause surtout les politiques scolaires, menées depuis une trentaine d'années, qui n'ont pas démontré leur efficacité et plus particulièrement l'éducation prioritaire.

Echec de l'éducation prioritaire

Le CNESCO pointe les effets pervers de l'éducation prioritaire. Mise en place il y a 35 ans, elle était conçue pour être temporaire, au risque justement de voir se développer des effets pervers de stigmatisation des établissements sur le long terme. Aujourd'hui, on constate plusieurs effets pervers parmis lesquels on notera :

  • la stigmatisation des établissements classés en éducation prioritaire avec pour conséquence une désertion des familles les plus favorisées et donc une mixité sociale mise à mal, et une dégradation du niveau des élèves ;
  • des moyens supplémentaires qui n'ont pas les effets escomptés : seulement deux élèves de moins en moyenne dans les établissements en éducation prioritaire que dans les autres ;
  • des temps d'enseignements plus courts : en cause, plus de temps consacré à la discipline ;
  • des enseignants moins expérimentés et davantage non-titulaires (contractuels non-formés) ;
  •  …

De plus, le rapport  estime que "loin de constituer une discrimination positive, l’éducation prioritaire pourrait progressivement avoir créé de inégalités de traitement en défaveur des élèves défavorisés", les effets pervers ayant pris le dessus sur les effets bénéfiques. L'augmentation constante du nombre d'élèves en éducation prioritaire participerait à la dilution des effets positifs, et les moyens supplémentaires alloués aux établissements ne sont pas ciblés sur les dimensions efficaces de l'enseignement. L'éducation prioritaire présente donc "des lacunes importantes mais ne doit pas être supprimée à court terme", du moins pas tant que la mixité sociale reste aussi faible.

 Préconisations

Face à ces constats, et s'appuyant également sur ses travaux antérieurs, le CNESCO estime que "le modèle éducatif français doit évoluer profondément sur des dimensions cruciales" que sont :

  • une clarification de sa vision de la justice à l'école ;
  • sa gouvernance : mettre fin à une logique de réforme à répétition et miser sur l'expertise des acteurs de terrain;
  • sa transparence;
  • sa logique de traitement de la difficulté scolaire;
  • sa capacité à reconnaître l'élève mais aussi l'enfant en intégrant les différentes dimensions de sa vie à (et dans) l'école.

En ce sens, il formule des préconisations comprenant des actions à mettre en oeuvre dans l'urgence, mais placées dans un cadre d'évolution de long terme. Elles s'organisent autour de sept grands objectifs :

  1. Miser sur l'expertise pédagogique des personnels enseignants et d'encadrement
  2. Mobiliser la prévention dès les premiers apprentissages
  3. Rompre avec les inégalités de traitement
  4. Evaluation : donner des repères nationaux aux acteurs de terrain
  5. Appliquer le principe d'équité aux politiques d'orientation
  6. Rendre plus équitable l'enseignement professionnel
  7. Assurer des conditions matérielles suffisantes aux apprentissages pour les élèves les plus démunis.

 

Dossier de synthèse et rapport à télécharger sur le site du CNESCO http://www.cnesco.fr/inegalites-sociales/

Sources :
- Lutte contre les inégalités : l'éducation prioritaire, un dispositif qui "ne marche pas". Maire-info, 27/09/2016.
- Un rapport pointe les échecs de l'éducation prioritaire. Localtis.info, 28/09/2016.
- Un rapport du Cnesco explore l'amplification des inégalités sociales à l'école. ASH, 27/09/2016.

 

Publié le 29 septembre 2016