C'est le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) qui a publié ces données début décembre. L'objectif est de comparer l'évolution de la délinquance et des violences enregistrées dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV) et les quartiers de reconquête républicaine (QRR) avec l'évolution des mêmes faits dans les territoires qui entourent ces quartiers.
Pour bien différencier QPV et QRR, rappelons que les QPV ont été définis par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine de 2014 dans l’objectif de réduire les écarts de développement entre les quartiers défavorisés et les unités urbaines les entourant. Le critère de définition des QPV est celui du revenu par habitant. Tandis que les QPV représentent un dispositif interministériel visant à réduire les inégalités, les QRR sont des dispositifs spécifiques au ministère de l'Intérieur qui ciblent les enjeux de sécurité au quotidien. Les QRR ont été mis en place à partir de septembre 2018 avec l'objectif de lutter contre la délinquance dans des territoires ciblés, grâce à des renforts d’effectifs de police et de gendarmerie et une politique de sécurité sur mesure. On compte 62 QRR aujourd'hui en France.
Les données du SSMSI montrent une concentration des faits de délinquance dans les QPV et QRR. Ce premier enseignement nécessite de garder en tête que :
- "Les QPV et les QRR appartiennent à des unités urbaines d’au moins 10 000 habitants. La délinquance qui y est enregistrée doit être replacée dans ce contexte urbain car les taux de délinquance augmentent avec la taille de l’agglomération" ;
- les données présentées correspondent aux infractions enregistrées par les services de police et de gendarmerie nationales. Seuls les faits qui ont été déclarés et enregistrés par ces services apparaissent donc ici.
Une concentration des violences physiques dans les QPV et QRR
Les données du SSMSI montrent que les violences enregistrées sont plus nombreuses dans les QPV et QRR que dans les unités urbaines qui les entourent. Les homicides, les coups et blessures volontaires dans et hors du cadre familial, sont plus récurrents en QPV que dans les zones urbaines les englobant. Cette tendance est encore plus marquée lorsqu'on observe les QRR : les taux de coups et blessures volontaires dans et hors du cadre familiale sont 1,5 point supérieurs dans ces quartiers aux taux dans les zones urbaines avoisinantes. Les vols violents sans arme ou les vols avec armes sont eux aussi supérieurs.
Si les violences physiques sont plus présentes, on peut cependant noter que les vols enregistrés sont moins nombreux en QPV que dans les unités urbaines qui les entourent. C'est notamment le cas pour les vols sans violence contre les personnes, les vols sur véhicules ou encore les cambriolages. Dans les QRR, seuls les taux de cambriolage sont plus faibles que les taux enregistrés dans les zones urbaines qui les englobent.
Une évolution de la délinquance moins favorable dans les QPV et QRR
Si l'on regarde les choses de manière dynamique, on observe un mouvement de concentration de la délinquance vers ces quartiers entre 2022 et 2023. En effet, la délinquance enregistrée dans les QPV augmente plus vite que dans les unités urbaines les englobant. C’est particulièrement le cas pour les homicides (+35 % contre -6 %), les vols avec armes (+33 % contre -6 %), ou encore les violences sexuelles (+13 % contre +6 %). On observe la même situation avec les QRR et les zones urbaines qui les entourent. On peut par ailleurs noter que le le nombre de mis en cause dans les QPV et QRR est plus important que dans le reste du territoire : en 2023, toutes infractions confondues, on compte 12,5 mis en cause pour 10 000 habitants dans les QPV et 11,9 pour 10 000 habitants dans les QRR contre 6,5 et 6,2 dans leurs unités urbaines englobantes respectives.
Les violences intrafamiliales, un enjeu pour les QPV et QRR
Enfin, il est ici pertinent de noter que ces données montrent que les QPV et QRR sont plus concernés que le reste du territoire par les violences au sein des familles. En 2023, on enregistre 2,8 faits de violence intrafamilale pour 1000 habitants sur le territoire national. Ce taux monte à 3,2‰ dans les villes de plus de 10 000 habitants. Mais si l'on se concentre sur ces quartiers en particulier, il passe à 4,5‰ dans les QPV et 4,3‰ dans les QRR. Par ailleurs, il est aussi intéressant de souligner l'évolution de ce type de faits entre 2022 et 2023 : les coups et blessures volontaires intrafamiliaux ont augmenté de 8% dans les QPV et de 3% dans les QRR. Il semble donc que l'enjeu des violences intrafamiliales et au sein du couple considéré comme une priorité par le gouvernement, soit particulièrement prégnant dans ces quartiers.
Vous pouvez retrouver l'intégralité du rapport et des données du SSMSI ci-dessous :