Au cours de sa séquence de l’automne sur la Politique de la ville qui s’est conclue par un discours à la Plaine Image (Roubaix-Tourcoing), le Président de la République a missionné en novembre 2017, Jean-Louis BORLOO pour la rédaction d’un « plan de bataille » sur la Politique de la ville.
Après plusieurs mois de rencontres avec des association d’élus, de professionnels, des collectivités et des visites de quartier, Jean-Louis BORLOO a officialisé la remise de son rapport « vivre ensemble, vivre en grand » à Edouard Philippe, Premier Ministre, le 26 avril dernier.
Ce rapport, propose un « big-bang » pour la Politique visant les quartiers et s’organise en 19 programmes détaillant à chaque fois, un diagnostic et des propositions, souvent chiffrées, permettant de réduire la fracture entre les quartiers et le reste des territoires.
Sans détailler l’ensemble des programmes, cet article vise à donner quelques éclairages sur les programmes et la capacité du rapport à influer des axes structurants pour une nouvelle Politique de la ville.
Une lecture transversale donne premièrement à voir une organisation de la politique de cohésion confiée aux intercommunalités avec un impératif de prise de responsabilité de la part des agglomérations. L’Etat impulserait des grands programmes nationaux qui seraient ensuite déclinés au local en fonction d’un projet de cohésion et de solidarité territoriales. Ce point ne diffère pas de la philosophie de la loi de programmation sur le ville et la cohésion urbaine de 2014, mais Jean-Louis Borloo l’a rappelé lors de différentes rencontres en amont de la remise du rapport, les agglomérations n’ont que trop peu piloté la Politique de la ville, n’ont pas encore pris la pleine responsabilité de la cohésion de leur territoire et l’enjeu est donc de les rendre proactives sur cette compétence.
Sur les grands axes qui se dessinent, il est à noter le retour de l’éducation (programme 4), au sens large, dans ce rapport. Si la réussite éducative et la réforme de l’éducation prioritaire ont permis de poursuivre les efforts sur l’éducation dans le cadre du pilier cohésion sociale des contrats de ville, il n’y a pas eu pour autant d’impulsion nouvelle sur les programmes. L’idée de mettre en place une cité éducative, avec une organisation territoriale renforcée et un lien plus fort à l’éducation prioritaire permettrait ainsi de lier l’ensemble des dispositifs et acteurs existants, à l’initiative des territoires. Cette cité éducative s’appuie notamment sur le primaire avec la poursuite du dédoublement des classes et les efforts dès l’entrée en scolarité des élèves. Plus généralement sur le pilier cohésion sociale, il est à noter, conformément aux annonces du président de la République en novembre dernier, un programme ambitieux sur la Petite enfance (Programme 3) et des propositions sur la culture, la santé et le sport (programmes 5, 6 et 15).
Sur la question du renouvellement urbain et du cadre de vie (programme 1), et outre la question de l’urgence à relancer les PRU par un passage accéléré à l’opérationnel, le rapport Borloo émet l’idée d’une fondation regroupant l’ensemble des acteurs inspiré de l’ambition première de l’ANRU en gagnant en souplesse. Cette idée de la fondation a d’ailleurs été bien accueillie par Xavier Bertrand, qui a proposé son déploiement sur les Hauts-de-France avec le soutien de la Région.
Axe majeur de ce rapport, le numérique occupe différents programmes (8 et 9 notamment) et fait la proposition de 200 campus numérique regroupant l’ensemble des outils du numérique et s’inspirant de la logique des zones franches (programme 7). Le numérique est vu comme une solution pour la jeunesse des quartiers, dont les compétences sur ces nouveaux métiers peuvent être soutenus par la montée en puissance des Grandes écoles du numérique.
Sur la question de l’emploi, le rapport préconise surtout la formation et la qualification des jeunes des quartiers pour qu’ils puissent jouer à armes égales sur le marché de l’emploi. Ainsi la systématisation de l’apprentissage, le lien plus fort aux entreprises et la création de l’académie des leaders sont autant d’outils qui pourront être mobilisés pour y parvenir (7 et 11).
Enfin, le rapport appelle à « remettre la république dans les quartiers » en revalorisant le travail social (12), en dynamisant la vie associative locale (16), en luttant contre les discriminations (17) et en garantissant la sécurité et la justice pour tous (13).
Le rapport propose une remise à plat de l’ensemble des dispositifs et de leur évaluation pour les rendre plus souples et plus agiles en fonction des réalités locales. Il est proposé la mise en place d’une cour d’équité territoriale devant permettre de garantir un fléchage effectif des crédits de droit commun sur l’ensemble du territoire. Le rapport préconise également la fin de la logique d’appels à projets pour gagner en souplesse sur les financements et sécuriser les acteurs.
Le rapport a été positivement accueilli par les associations d’élus et de collectivités (ADCF et France urbaine notamment). Du côté du gouvernement, également en pleine phase de synthèse des propositions issues de la concertation autour de la mobilisation nationale pour les quartiers, et outre les positions formulées par le Président de la République le 22 mai, il conviendra d’attendre le CIV programmé prochainement.