La cour des comptes a rendu ses observations définitives le 27 novembre 2023, concernant l’exercice des fonctions du SG-CIPDR de 2018 à 2022 et transmis le 22 décembre un référé à la Première ministre.
La remise de ce rapport fait suite au scandale médiatique qui a amené l’inspection général de l’administration à enquêter sur la gestion du « Fonds Marianne ». Mis en place en 2021, ce fonds avait pour objectif de financer les associations qui défendent « les valeurs de la République ».
C’est par un décret du 17 janvier 2006 que le Comité Interministériel de la Prévention de la Délinquance et de la Radicalisation (CIPDR) et le secrétariat général sont institués. Selon l’article 3 dudit décret, le secrétariat général assure le secrétariat du comité, prépare ses travaux et délibérations. Au fil des années, son spectre d’intervention s’est élargi pour des thèmes allant de la délinquance, radicalisation, communautarisme, séparatisme ou encore à la diffusion d’un contre-discours républicain.
Le rapport de la cour des comptes relève de nombreux dysfonctionnements :
- Concernant le SG-CIPDR, plusieurs anomalies sont mises en exergue par la cour des comptes :
- Un statut inexistant : « aucun acte réglementaire n’a créé le secrétariat général lui-même sur lequel s’appuie le secrétaire général pour mener son action ». Par ailleurs, le SG-CIPDR a pour mission de formaliser la stratégie nationale. Or, selon la cour des comptes : « ce travail ne fait pas l’objet d’une validation interministérielle formelle en l’absence de réunions régulières du comité interministériel qui a la charge de les approuver ».
- Une organisation et une gestion des ressources humaines insatisfaisantes : « l’élargissement des missions du secrétariat général du CIPDR s’est traduit par une augmentation continue des effectifs dans un cadre confus ».
- Une gestion défaillante des crédits : « la diffusion de la circulaire annuelle fixant la doctrine du Fonds Interministériel de Prévention de la Délinquance (FIPD) est trop tardive pour assurer des conditions d’arbitrage et d’exécution budgétaire satisfaisante », l’examen des dossiers 2020, 2021 et 2022 relevant de l’enveloppe centrale a montré un niveau de maitrise insuffisant des procédures d’instruction, d’exécution des crédits et de contrôle des bénéficiaires ».
- Concernant les instances interministérielles, la cour des comptes pointe du doigt :
- Le comité interministériel de la prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) est censé coordonner le travail interministériel sur différentes thématiques (délinquance, radicalisation, séparatisme, communautarisme et la diffusion d’un contre-discours républicain). Or, ce que révèle le rapport est que de 2018 à 2022, il n’y a eu que trois rencontres comités et donc une évaluation insuffisante et un constat qu'il « il ne remplit pas réellement sa mission de coordination du travail interministériel ».
- La cellule nationale de lutte contre l’islamisme radical et le repli communautaire (CLIR) a été créée en 2022 et a pour mission de traiter les dossiers nationaux ou communs à plusieurs départements. Un an après sa création, la cour révèle qu’elle ne s’est toujours pas réunie.
- Le COnseil Scientifique sur les Processus de RADicalisation (COSPDRAD) a pour missions de « proposer des axes de recherche prioritaires sur les questions de radicalisation », « favoriser l’organisation d’états généraux de la recherche sur la radicalisation », « favoriser la réflexion sur l’accès aux données à caractère sensible en matière de radicalisation » aevc toujours ce même constat Selon la cour, il s’est également peu réuni.
Le référé du 22 décembre adressé à la Première ministre émet trois recommandations :
- « Réunir régulièrement les enceintes interministérielles chargées de définir, impulser et coordonner les politiques de contre délinquance et la radicalisation ».
- « Doter le SG-CIPDR d’un statut juridique solide et de missions clarifiées ».
- « Mettre en place une organisation garantissant le respect des règles de gestion des crédits centraux du FIPD ».
Le 4 mars 2024, le nouveau secrétaire général du CIPDR, Etienne Apaire, répond au relevé d’observation définitive de la cour des comptes en proposant des mesures telles que :
- la mise en place de réunions régulières du comité de pilotage afin d’élaborer la future stratégie nationale de prévention de la délinquance
- L’élaboration de la nouvelle feuille de route concernant l’actualisation du plan de prévention de la radicalisation en collaboration avec le coordinateur national du renseignement et de la lutte antiterroriste (CNRLT)
- La présence du secrétaire général à d’autres cellules de lutte contre l’islamisme et le repli communautaire (CLIR)
- Une mobilisation plus régulière des instances interministérielles et l’implémentation d’une délégation avec un statut et des missions clarifiés
- La clarification du rattachement à la Miviludes
- L’élaboration d’une rigueur administrative et budgétaire afin de sécuriser l’attribution de subventions
Revue de presse
- La gazette des communes (4 mars 2024) La Cour des comptes se paye la gestion « inquiétante » du SG-CIPDR
- Le monde (4 mars 2024) La Cour des comptes sévère avec le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation
- L’express (4 mars 2024) La Cour des comptes étrille le Comité de prévention de la radicalisation
- Le Parisien (4 mars 2024) La Cour des comptes étrille la gestion du Comité de prévention de la radicalisation
- Libération (4 mars 2024) Délinquance et radicalisation : un comité interministériel quasi fantôme, conclut la Cour des comptes
- Ouest France (4 mars 2024) Après le fonds Marianne, la Cour des comptes étrille le comité de prévention de la radicalisation
- Public Sénat (4 mars 2024) Comité de prévention de la radicalisation : la Cour des comptes étrille une gestion « défaillante »