Ce colloque était organisé en deux tables rondes. Claire Hédon, Défenseur des droits, a eu un mot d’introduction.
La première table ronde « connaître et reconnaître les discriminations territoriales » réunissait les élu.e.s de différents territoires :
- Philippe Rio, maire de Grigny
- Hélène Geoffroy, maire de Vaulx-en-Velin
- Driss Ettazaouin, Vice-président en charge de la Politique de la ville à la communauté d’agglomération d’Evreux
- Gilles Leproust, maire d’Allonnes
Elle était animée par Johanna Dagorn, sociologue et co-directrice des Cahiers de la Lutte contre les discriminations (LCD).
Un deuxième temps a été consacré à un focus sur quelques territoires, et la présentation des travaux de deux chercheurs :
- Thomas Kirszbaum, sociologue associé à l’ISP (ENS Cachan)
- Corinne Luxembourg, géographe et maîtresse de conférence HDR à l’Ecole Supérieure Nationale d’Architecture à La Villette.
Ce temps était animé par Arnaud Alessandrin, sociologue et co-directeur des Cahiers de la LCD.
Peut-on parler de « discriminations territoriales » ?
L’un des points de débat de la rencontre a porté sur l’usage du terme de « discriminations territoriales ». Cette notion, bien que très utilisée, n’est pas à proprement parler un concept scientifique. Il s’agit d’une notion popularisée ces trente dernières années dans le débat public afin de désigner les discriminations vécues par les habitant.e.s des quartiers en Politique de la ville.
Le chercheur Thomas Kirszbaum a alerté sur l’emploi de cette expression, en pointant son flou conceptuel. En effet, les termes de « discriminations territoriales » ne permettent pas de savoir s’il s’agit de discriminations individuelles ou collectives, et l’utilisation de cette expression masque le vécu de discriminations ethno-raciales par les habitant.e.s des quartiers en Politique de la ville.
Un point de vigilance a également été placé sur les objectifs de la Politique de la ville. Celle-ci viserait à la « normalisation » des quartiers et des populations qui y vivent, en sous-entendant que les habitant.e.s qui y vivent refuseraient de s’intégrer. Une représentation qui s’avère dangereuse puisqu’elle fait peser la responsabilité des discriminations sur les victimes.
La difficile mise en œuvre de la lutte contre les discriminations dans les contrats de ville
Les chercheur.euse.s ont également souligné que la lutte contre les discriminations a été pensée pour être un axe transversal véritablement opérationnel des contrats de ville. Un objectif pas, ou peu, atteint aujourd’hui malgré l’obligation de sa prise en compte dans les contrats de ville. La lutte contre les discriminations souffre d’un « déficit d’institutionnalisation » (Thomas Kirszbaum) et ne dispose pas d’objectifs et d’outils précis à sa mise en œuvre.
Quelle échelle pour la lutte contre les discriminations ?
Un autre point de vigilance a été posé sur la lutte contre les discriminations à l’échelle des contrats de ville. Les discriminations ne se jouent pas qu’à l’échelle des quartiers en Politique de ville, et peuvent avoir lieu dans d’autres espaces de la ville et sur des populations qui ne vivent pas forcément en QPV.
Approche intersectionnelle
Corinne Luxembourg, milite pour une prise en compte intersectionnelle des problématiques rencontrées dans les QPV.
Elle rappelle également l’importance de la prise en compte du genre dans l’étude et les projets menés dans les quartiers en Politique de la ville. En effet, dans les QPV les familles monoparentales sont majoritairement des mères, et les personnes âgées sont majoritairement des femmes.